Problèmes environnementaux sur le Nil

Publié le par gazettedugeographe

 

Nous sommes ici en présence d’une photographie montrant des pêcheurs en train de se frayer un passage dans une sorte de mini-jungle flottante. En l’occurrence, nous nous trouvons sur le Nil à proximité du lac Victoria, et les plantes en question sont le résultat d’un phénomène particulier : la colonisation de milieux aquatiques tropicaux par la jacinthe d’eau.

Cette jacinthe d’eau est une plante que l’on trouve communément dans nos jardins d’eau, nos bassins ou autres aquariums. Originaire du bassin de l’Amazone, elle a été introduite par l’homme dans la plupart des pays chauds comme ornements où elle a ensuite proliféré et est devenue ce qu’on appelle un adventice1. C’est une plante se développant à la surface ou dans les boues d’un cours d’eau et qui peut mesurer jusqu’à un mètre de haut sur deux mètre de largeur, le problème étant sa prolifération prodigieuse : elle double sa surface en seulement une à deux semaines.

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La jacinthe d'eau est ainsi devenue un véritable fléau dans certains pays d'Afrique où sa prolifération menace la faune et la flore. Elle y forme de véritables tapis asphyxiant littéralement les lacs et les cours d'eau, provoquant de graves crises écologiques et hydro-agricoles. La plante, grâce à la hauteur et à la forte densité qu’elle peut atteindre, peut réduire la lumière et l’oxygène sous l’eau. Cette asphyxie de la vie sous-marine affecte l’équilibre de l’écosystème aquatique. Elle freine également le transport fluvial, la pêche et obstrue les prises d’eau des barrages hydroélectriques et des réseaux d’irrigation.

Par exemple au lac Tchad, la jacinthe d'eau a été importée en 1989. Cinq ans plus tard, elle recouvrait déjà 80% de la surface. Pour les pêcheurs, c'est une vraie catastrophe. Non seulement les lignes se prennent dans les racines, mais l'eau devient plus chaude et pauvre en oxygène, tuant les poissons. Les pêcheurs se plaignent de plus des attaques répétées de crocodiles et de serpents s’y abritant. De plus, la plante bloque les voies d'eau et les ports, et paralyse les barrages hydrauliques. En s'introduisant dans les turbines, elle provoque des interruptions de production. La couverture végétale est si dense à certains endroits que l'on peut marcher dessus sans s'enfoncer. Et ce n'est pas tout : l'évapotranspiration serait 1,8 fois plus élevée en présence de la jacinthe d'eau. Le débit du Nil au lac Victoria serait ainsi réduit d'un dixième à cause de la plante. Au lac Tchad, de nombreuses maladies ont accompagné l'arrivée de la jacinthe d'eau. La malaria se développe grâce aux moustiques qui se reproduisent dans l'eau stagnante. En empêchant les autres plantes de respirer, elle entraîne un pourrissement végétal qui infecte l'eau potable.

Des programmes existent pour essayer de l'éradiquer. Plusieurs espèces d'insectes ou de champignons ont été identifiées comme prédateurs de la jacinthe d'eau Mais cette méthode peut prendre longtemps. La lutte chimique a été la première méthode utilisée. Or l'application d'herbicides est efficace sur des petites surfaces, mais elle est impuissante face à la prolifération excessive et peut être toxique. Il existe enfin la récolte manuelle : des bateaux qui ratissent la surface de l'eau. Une fois débarrassées de toute leur eau, les feuilles récoltées peuvent servir de fibre pour du tissu ou du papier et en Asie du Sud on les utilise même pour nourrir le bétail. Mais cette méthode est couteuse (il faut transporter les énormes masses de feuilles par camion), et dangereuse (attaques de crocodiles et d'hippopotames)

Autrement, au regard de sa capacité reproductrice et de sa résistance, il est pour le moment impossible de l’éradiquer une fois qu’elle s’est installée dans une nouvelle zone.

 

 T.D.

 

1 Espèce végétale étrangère à la flore indigène d’un territoire dans lequel elle a été introduite et où elle s’installe

 

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